Pierre Laborde-Turon a rejoint le BPFC cet été, où il évolue en numéro 2 cette saison. © Sylvain Desgroppes. |
Enfant
du sud-ouest, Pierre Laborde-Turon va regoûter aux joies de la
compétition ce weekend, avec le septième tour de coupe de France au
programme pour le BPFC. Le bordelais de naissance, qui a rejoint
Bergerac cet été, a un parcours et surtout une vision du football
peu commune. Travailleur, humble, il n'hésite pas à se remettre en
question et à analyser finement les situations qui se proposent à
lui depuis le début de sa carrière, pour en tirer profit.
À
23 ans, le jeune gardien a déjà vécu de belles aventures. Il fait
ses débuts sur un terrain dès l'âge de six ans à Bruges, dans la
banlieue de Bordeaux. En poussin (huit ans), il passe des détections
aux Girondins de Bordeaux, et intègre le club phare de la région
pour ne plus le quitter de sa formation. Une belle et longue histoire
de plus de dix ans, avec une évolution progressive à travers les
catégories d'âge et les compétitions prestigieuses disputées.
Un
parcours
«
Au départ, c'est la découverte. Même si on est jeune et que l'on
n'est pas dans le monde professionnel, on rentre dans un cadre
particulier. Il y a le maillot, les matches internationaux, le regard
des autres équipes », se souvient Pierre Laborde-Turon. Le
football, passion, prend ensuite progressivement un autre aspect. «
À partir de treize ou quatorze ans, le recrutement des Girondins
s'élargit sur le territoire, on rentre dans le travail, le combat,
la concurrence », continue-t-il.
Vient
enfin le temps de la préformation, en U17 puis U19 nationaux. Même
s'il n'a pas signé professionnel au FCGB, aujourd'hui encore, les
souvenirs sont bons chez le gardien : « La troisième phase, c'est
le rêve. Chaque matin, on rêve d'être appelé pour aller
s'entraîner avec les professionnels, j'ai eu quelques occasions de
le vivre ». Avec en point d'orgue, la victoire en coupe Gambardella
2013 pour une génération dorée dont il ne reste guère plus de
trace...
«
Je me souviens de deux choses en particulier. Le tournoi de Montaigu,
qui reste dans les mémoires, et cette finale de 2013, qui était
magnifique au stade de France, avec les professionnels qui jouaient
derrière », ajoute Pierre Laborde-Turon. Mais son club de toujours
ne lui propose ensuite qu'un an de contrat, alors que de nombreux
gardiens composent déjà les effectifs seniors. Avec si peu de
visibilité, le girondin fait un autre pari.
«
J'ai décidé de partir dans le monde amateur, à Rodez. J'y ai
commencé numéro 2, puis numéro 1 bis, et enfin numéro 1 la
quatrième saison », évoque-t-il. Arrivé en 2013 donc, c'est en
effet la saison 2016-2017 qui le verra prendre possession du poste de
titulaire. Une année terminée par une montée en N1, mais à
l'issue de laquelle il quitte le RAF. « Cela reste un très bon
souvenir malgré tout, vivre une montée, quel que soit le niveau,
c'est dur à faire et c'est rare », précise-t-il.
Il
rejoint alors Belfort, qui descend justement de N1, et dispute une
deuxième saison consécutive en tant que gardien titulaire en N2. «
J'ai appris beaucoup là-bas, mais je voulais revenir dans ma région,
donc cet été, j'ai cherché un nouveau club », explique-t-il,
justifiant ainsi son court exode. Le mercato estival qu'il va vivre
est alors particulier. Alors que des clubs de N2 sont intéressés,
il s'engage dans un premier temps avec Libourne.
Mais
le club girondin, qui pensait être repêché en N3, descend
finalement en R1, Limoges étant maintenu en N3 justement. Pierre
Laborde-Turon, qui avait depuis quelque temps des discussions
avancées avec Bergerac, choisit donc finalement le projet périgordin
en N2. Même avec la présence au club d'Anthony Loustallot, gardien
titulaire, signifiant un nouveau rôle à endosser pour le jeune
portier après deux saisons pleines.
Apprendre
à chaque étape
Un
choix qui peut surprendre, mais sur lequel Pierre Laborde-Turon
s'explique : « Je préfère revenir dans ma région et y aider un
club à évoluer, même en numéro 2, que d'aller jouer avec un club
plus éloigné. Je suis compétiteur, et forcément j'ai envie de
jouer, mais je veux travailler sur le long terme, je sais être
patient ». Un état d'esprit peu commun, et qui correspond à la
volonté sans cesse affirmée par le président Christophe Fauvel de
recruter des joueurs de la région.
Mais
cette mentalité est aussi à l'image du gardien, qui depuis qu'il
est sorti des catégories de jeunes du centre de formation des
Girondins de Bordeaux, n'a eu de cesse de faire de chacune de ces
années de football une année de travail et d'expérience
supplémentaire. Le tout avec une grande lucidité sur les défauts
de la jeunesse, souvent observés : « On a l'impression que l'on
peut tout faire, que l'on a tout appris au centre de formation »,
commence-t-il.
Mais
passer du centre de formation justement, où l'on ne côtoie que des
joueurs de son âge, à un vestiaire senior de N2, avec des profils
très expérimentés, aguerris à ce niveau de compétition, est une
grande étape. « On se rend compte que l'on a besoin de plein de
choses, que l'on a un apprentissage important à faire. Partir des
U19 à dix-huit ans seulement, cela m'a fait gagner en maturité »,
estime le néo-bergeracois.
Confronté
à d'autres profils de joueurs, il profite de chaque entraînement
pour apprendre, et va chercher les informations partout où il peut
les prendre. Avec les attaquants de son équipe de Rodez notamment :
« Beaucoup ont joué plus haut, ils ont de l'expérience, de la
malice dans leurs prises de décision, dans leurs gestes. On cherche
donc à les comprendre pour s'améliorer », commence-t-il. La
relation qu'il noue avec son homologue numéro 1 est importante et
enrichissante aussi.
«
Il y avait plein de choses que j'avais besoin de savoir et de
maîtriser. Comment se relever après une erreur ? Comment
appréhender un match ? Comment imposer une forme de présence ?
Quand prendre la parole, rassurer le groupe ?... », continue Pierre
Laborde-Turon. Le tout dans un contexte bien plus concurrentiel et
avec une forme de pression, sortie du cocon du centre de formation où
les résultats ont une moindre importance qu'avec l'équipe fanion
d'un club en N2.
C'est
à travers toutes ces années d'apprentissage que le gardien s'est
construit. À 23 ans aujourd'hui, il peut ainsi se targuer d'un
solide bagage pour un jeune gardien. Sa saison à Bergerac est la
sixième en N2, avec deux saisons en tant que titulaire. Sa place de
gardien remplaçant pour cette année est une étape de plus, une
façon de continuer à apprendre. Le tout à un poste bien
particulier dans le football, sur et en dehors du terrain.
Gardien,
un rôle, une mentalité
Il
faut avant tout être un passionné pour évoluer dans ce rôle de
gardien de but. C'est le cas pour Pierre Laborde-Turon, qui dès le
plus jeune âge a choisi ce poste. « Il y a cette part de
responsabilité et de risque, car on sait que la moindre erreur se
paiera cash. On est aussi dans l'ombre, c'est un autre travail, une
autre façon d'agir et d'aider l'équipe », décrit-il. La
compétition entre joueurs pour le même poste est complètement
différente aussi.
Titulaire
ou remplaçant, les rôles sont beaucoup plus figés sur une saison,
et les fonctions en rapport au collectif sont différentes. « En
tant que numéro 2, il faut avoir la volonté de travailler deux fois
plus, surtout quand on arrive dans un nouveau club. Il faut que le
staff et les joueurs aient confiance », note le gardien. C'est
ensuite la relation entre les deux gardiens qui doit se tisser au fil
du temps. Être à la fois en compétition, tout en étant un
soutien, une aide.
Pour
avoir connu les deux rôles, le bordelais est bien placé : « Il
faut qu'il y ait cette complicité, l'envie de se défendre l'un et
l'autre, pour que chacun soit plus performant individuellement. Le
numéro 1 est en place, il doit travailler et être performant. Le
numéro 2 doit travailler encore plus, encourager, conseiller ».
Vis-à-vis du groupe aussi, la fonction n'est pas la même, le
gardien titulaire ayant plus un rôle dans l'autorité, quand le
remplaçant accompagne, soutient, permet un équilibre.
Et
comme le veut la tradition, la coupe, en l'occurrence la coupe de
France pour Bergerac, est synonyme d'inversion des rôles. Le temps
de quelques rencontres, ponctuellement, c'est le numéro 2 qui
retrouve la compétition à haute intensité et doit assumer sa
fonction. « C'est une fierté car cela montre que le coach a
confiance en nous quand même. Mais on n'a qu'une chance, donc il ne
faut pas se louper, on se doit de répondre présent au bon moment »,
affirme le portier bergeracois.
Surtout
quand se présente avec la coupe de France la possibilité de vivre
une belle aventure. Comme celle qu'a vécu le gardien avec Belfort
l'an dernier, et un septième tour joué et gagné en Martinique. «
On rêve tous de jouer un club de Ligue 1, de faire venir du monde à
domicile, et de vivre l'espace d'un match ce que eux vivent tout le
temps. Mais les premiers tours pour y arriver sont les plus durs, on
joue chez des clubs qui sont à notre place quand on joue une L1 »,
juge-t-il.
Ce
sera le cas à la Brède, avec l'envie de prolonger un peu
l'aventure, très utile aussi pour accompagner la formation d'un
esprit de groupe en ce début de saison au BPFC. Quant à la suite à
plus long terme, Pierre Laborde-Turon voit large. « J'espère
avancer avec ce club, gagner une place et réussir les projets du
BPFC, qui sont la montée à terme en N1, et l'envie de faire grandir
la vision que les gens ont ici du club et du football, pour faire
venir du monde au stade », conclut-il.
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