samedi 30 mars 2019

Senghor, au centre du jeu

Arrivé à Gardonne en 2012, joueur expérimenté, collectif, fin connaisseur du jeu, Philippe Senghor est un élément incontournable de l'ESG.

Philippe Senghor est un élément
incontournable de l'effectif gardonnais.
© Yannick Monsec.
Il y a des histoires qui ne pourraient s'inventer, des scénarios de films qui ne pourraient s'écrire. Le sport collectif en fourmille, et celle qui lie Philippe Senghor à l'ES Gardonne Basket fait partie de ses aventures qui méritent d'être racontées. Les années passent, et le joueur arrivé en 2012 reste dans le projet comme un élément incontournable, quel que soit le niveau, les coéquipiers, le coach sur le banc de touche.
Tout a pourtant commencé bien loin de Gardonne. D'origine sénégalaise, et ayant grandi en Côte d'Ivoire, c'est à Bordeaux que Philippe Senghor arrive en 2002, à l'âge de 18 ans. Il signe alors au Bordeaux Étudiants Club (BEC) sa première licence de basket, lui qui n'a fait que pratiquer ce sport entre amis jusque-là. Il va passer quatre ans dans son premier club, quatre années fondamentales pour sa construction.

Un riche parcours
Après deux ans avec l'équipe réserve du BEC en pré-régionale, il intègre en effet l'équipe fanion en pré-nationale. « On est monté avec la réserve, et le coach a fait appel à moi en A. Ce coach, c'est Francis Dandine. Je lui dois tout ce que je suis aujourd'hui, c'est devenu comme un deuxième père, il m'a appris tous les fondamentaux du basket », évoque avec émotion le joueur gardonnais.
Avec son entraîneur, il change de cap et sait qu'il peut maintenant construire sa carrière à travers le basket. « Il m'a appris comment me placer sur un terrain, comment me déplacer par rapport à mes partenaires, comment marquer, ce que demandait chaque poste. C'est l'entraîneur qui m'a permis de m'adapter à tous les entraîneurs et à tous les styles de jeu que j'ai pu connaître ensuite », détaille Philippe Senghor.
Tout va très vite pour lui, et il rejoint le SA Mérignac en 2006 pour monter encore d'un cran, sous les ordres de Frédéric Bobst. Il est alors sûr de son choix. « On parlait beaucoup avec Francis Dandine, il m'a appris à m'évaluer, et à évaluer mes adversaires. Avec le BEC, on jouait contre des équipes de niveau national en coupe, et il me disait que j'avais le niveau pour y figurer également », explique le gardonnais.
Au SAM, il découvre de nouvelles formes de jeu, et passe là aussi des saisons enrichissantes sur le plan tactique. Il se construit sa propre philosophie, sa propre vision du jeu. « On avait un style de jeu très rapide, et on prenait beaucoup de shoots », se rappelle-t-il. Vient alors le moment de la rencontre avec les dirigeants de l'ESG, toujours en place aujourd'hui. Il suffit de quelques mots pour convaincre Philippe Senghor de venir en Dordogne.
Pourtant, après une saison, le joueur part pour Dax, en N2. « J'ai toujours voulu jouer au plus haut niveau que je pouvais, mais j'étais un joueur étranger, donc on est limité à deux par équipes, et ce sont souvent les postes 1 et 5 qui sont privilégiés. Là, il y avait une opportunité », explique-t-il. Il reste tout de même en contact avec Gardonne, et fort de son vécu lors de la saison 2013-2014, il retrouve très vite une équipe périgordine promue en N3.

Un joueur majeur
Cette parenthèse d'un an lui aura une fois encore permis de s'enrichir d'une expérience importante au sein d'un club comme l'ESG. « Je considère que mon année à Dax a été un retour sur investissement pour Gardonne, j'ai pu apprendre, voir le niveau N2, et revenir », juge Philippe Senghor. Sous les ordres de Sylvain Lautié, le club montera dès la première saison en N2 pour ne plus quitter cette division.
Senghor est toujours précieux
des deux côtés du terrain.
© Yannick Monsec.
Au fur et à mesure des années, le poste 3/4 gardonnais a toujours été un joueur majeur, un joueur apprécié de ses coéquipiers, des dirigeants qui lui accordent une grande confiance, et du public gardonnais. Les valeurs qu'il véhicule y sont pour beaucoup. Le coach Frédéric Rocco, arrivé cet été, n'a pas mis longtemps à se servir de ce profil si précieux dans la construction de son groupe, et l'a vite intégré au cinq de départ.
L'ex-entraîneur marmandais avait déjà essayé de le recruter dans ses précédentes équipes. « S'il y a bien un joueur à mettre en lumière, c'est lui, pour tout ce qu'il fait pour le club et l'équipe. Je préfère l'avoir avec moi que contre moi. C'est un joueur extraordinaire, un joueur d'équipe, un fort défenseur. Il ne lâche jamais rien, et c'est un fin connaisseur du jeu, toujours lucide », décrit Frédéric Rocco.
Beaucoup d'éloges qui caractérisent l'importance sur le terrain comme dans le vestiaire de Philippe Senghor, repositionné en poste 3 cette saison pour apporter ses qualités de création, sa vitesse, et son shoot. « Il exprime mieux ses qualités d'agressivité et d'intensité qu'en poste 4. On l'utilise pour stopper les forts joueurs adverses, il est au lancement de toutes les contre-attaques, et il retrouve une efficacité dans son tir à trois points », estime le coach.
Les qualités défensives sont peut-être l'un des principaux éléments du joueur gardonnais. Elles sont la traduction de sa façon de concevoir le basket. « Ce que j'aime, c'est attaquer. Mais pour pouvoir beaucoup attaquer, il faut défendre, pour récupérer un maximum de ballons et pour que tout le monde puisse se faire plaisir et avoir des possibilités de tir », estime Philippe Senghor.

Un état d'esprit
Une philosophie qu'il s'est appropriée progressivement, et qu'il restitue aussi auprès de l'équipe réserve du club qu'il entraîne depuis trois saisons. Une équipe composée en partie de ses jeunes coéquipiers complétant l'effectif de la N2. Résultat : à cinq journées de la fin, il ne manque qu'une victoire à l'ESG B pour valider la montée en régional 2, le tout avec la meilleure défense de la poule. Le succès est au rendez-vous aussi sur le banc de touche.
Le joueur est un cadre
du vestiaire gardonnais.
© Yannick Monsec.
Il n'y a de toute façon pas de place pour l'échec dans l'esprit de Philippe Senghor, qui est presque un entraîneur sur le terrain. « Je vois le basket comme les échecs. Si on lit le jeu, que l'on sait ce que va faire l'adversaire en attaque, en défense, ses stratégies, on analyse mieux, on a moins besoin de se déplacer et on a plus de chance de gagner », détaille-t-il. Gagner, ou plutôt ne pas perdre, comme il aime à le répéter.
« Un coach m'a posé une question un jour, et je l'ai toujours en tête. Il a demandé aux joueurs s'ils aimaient gagner ou s'ils détestaient perdre. Je déteste perdre. Aimer gagner, c'est accepter la défaite. Quand on perd un match, je n'en dors pas de la nuit, je suis horrible à vivre », avoue le gardonnais. Une mentalité qui colle à ce projet de l'ESG, qu'il porte comme Antoine Adgnot, formé au club, mais aussi Ridwan Rabah et Darko Kastratovic, arrivés en 2014.
« On est devenu une famille, on se trouve les yeux fermés sur un terrain, on a cette culture, une base solide qui s'est forgée lors de la montée de N3 en N2 notamment. C'est à travers ces souvenirs que l'on se construit » lance Philippe Senghor. Garant de la continuité de cette mentalité, il n'est pas étonnant qu'il soit devenu l'un des joueurs emblématiques du club. Derrière sa discrétion apparente se trouvent un caractère affirmé, et des idées bien tranchées.
« Quand on est ensemble sur le terrain, on ne veut qu'une chose, que Gardonne soit une place forte de la N2, un club respecté à ce niveau. La seule chose qui compte, c'est que le club reste, nous, on partira tous à un moment », conclut-il. Un message fort pour celui qui, à 34 ans, ne se voit pas évoluer ailleurs qu'à l'ESG l'an prochain, et qui se tient à la disposition des dirigeants pour prolonger encore l'aventure.

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