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Philippe Senghor est un élément incontournable de l'effectif gardonnais. © Yannick Monsec. |
Il
y a des histoires qui ne pourraient s'inventer, des scénarios de
films qui ne pourraient s'écrire. Le sport collectif en fourmille,
et celle qui lie Philippe Senghor à l'ES Gardonne Basket fait partie
de ses aventures qui méritent d'être racontées. Les années
passent, et le joueur arrivé en 2012 reste dans le projet comme un
élément incontournable, quel que soit le niveau, les coéquipiers,
le coach sur le banc de touche.
Tout
a pourtant commencé bien loin de Gardonne. D'origine sénégalaise,
et ayant grandi en Côte d'Ivoire, c'est à Bordeaux que Philippe
Senghor arrive en 2002, à l'âge de 18 ans. Il signe alors au
Bordeaux Étudiants Club (BEC) sa première licence de basket, lui
qui n'a fait que pratiquer ce sport entre amis jusque-là. Il va
passer quatre ans dans son premier club, quatre années fondamentales
pour sa construction.
Un
riche parcours
Après
deux ans avec l'équipe réserve du BEC en pré-régionale, il
intègre en effet l'équipe fanion en pré-nationale. « On est monté
avec la réserve, et le coach a fait appel à moi en A. Ce coach,
c'est Francis Dandine. Je lui dois tout ce que je suis aujourd'hui,
c'est devenu comme un deuxième père, il m'a appris tous les
fondamentaux du basket », évoque avec émotion le joueur
gardonnais.
Avec
son entraîneur, il change de cap et sait qu'il peut maintenant
construire sa carrière à travers le basket. « Il m'a appris
comment me placer sur un terrain, comment me déplacer par rapport à
mes partenaires, comment marquer, ce que demandait chaque poste.
C'est l'entraîneur qui m'a permis de m'adapter à tous les
entraîneurs et à tous les styles de jeu que j'ai pu connaître
ensuite », détaille Philippe Senghor.
Tout
va très vite pour lui, et il rejoint le SA Mérignac en 2006 pour
monter encore d'un cran, sous les ordres de Frédéric Bobst. Il est
alors sûr de son choix. « On parlait beaucoup avec Francis Dandine,
il m'a appris à m'évaluer, et à évaluer mes adversaires. Avec le
BEC, on jouait contre des équipes de niveau national en coupe, et il
me disait que j'avais le niveau pour y figurer également »,
explique le gardonnais.
Au
SAM, il découvre de nouvelles formes de jeu, et passe là aussi des
saisons enrichissantes sur le plan tactique. Il se construit sa
propre philosophie, sa propre vision du jeu. « On avait un style de
jeu très rapide, et on prenait beaucoup de shoots », se
rappelle-t-il. Vient alors le moment de la rencontre avec les
dirigeants de l'ESG, toujours en place aujourd'hui. Il suffit de
quelques mots pour convaincre Philippe Senghor de venir en Dordogne.
Pourtant,
après une saison, le joueur part pour Dax, en N2. « J'ai toujours
voulu jouer au plus haut niveau que je pouvais, mais j'étais un
joueur étranger, donc on est limité à deux par équipes, et ce
sont souvent les postes 1 et 5 qui sont privilégiés. Là, il y
avait une opportunité », explique-t-il. Il reste tout de même en
contact avec Gardonne, et fort de son vécu lors de la saison
2013-2014, il retrouve très vite une équipe périgordine promue en
N3.
Un
joueur majeur
Cette
parenthèse d'un an lui aura une fois encore permis de s'enrichir
d'une expérience importante au sein d'un club comme l'ESG. « Je
considère que mon année à Dax a été un retour sur investissement
pour Gardonne, j'ai pu apprendre, voir le niveau N2, et revenir »,
juge Philippe Senghor. Sous les ordres de Sylvain Lautié, le club
montera dès la première saison en N2 pour ne plus quitter cette
division.
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Senghor est toujours précieux des deux côtés du terrain. © Yannick Monsec. |
Au
fur et à mesure des années, le poste 3/4 gardonnais a toujours été
un joueur majeur, un joueur apprécié de ses coéquipiers, des
dirigeants qui lui accordent une grande confiance, et du public
gardonnais. Les valeurs qu'il véhicule y sont pour beaucoup. Le
coach Frédéric Rocco, arrivé cet été, n'a pas mis longtemps à
se servir de ce profil si précieux dans la construction de son
groupe, et l'a vite intégré au cinq de départ.
L'ex-entraîneur
marmandais avait déjà essayé de le recruter dans ses précédentes
équipes. « S'il y a bien un joueur à mettre en lumière, c'est
lui, pour tout ce qu'il fait pour le club et l'équipe. Je préfère
l'avoir avec moi que contre moi. C'est un joueur extraordinaire, un
joueur d'équipe, un fort défenseur. Il ne lâche jamais rien, et
c'est un fin connaisseur du jeu, toujours lucide », décrit Frédéric
Rocco.
Beaucoup
d'éloges qui caractérisent l'importance sur le terrain comme dans
le vestiaire de Philippe Senghor, repositionné en poste 3 cette
saison pour apporter ses qualités de création, sa vitesse, et son
shoot. « Il exprime mieux ses qualités d'agressivité et
d'intensité qu'en poste 4. On l'utilise pour stopper les forts
joueurs adverses, il est au lancement de toutes les contre-attaques,
et il retrouve une efficacité dans son tir à trois points »,
estime le coach.
Les
qualités défensives sont peut-être l'un des principaux éléments
du joueur gardonnais. Elles sont la traduction de sa façon de
concevoir le basket. « Ce que j'aime, c'est attaquer. Mais pour
pouvoir beaucoup attaquer, il faut défendre, pour récupérer un
maximum de ballons et pour que tout le monde puisse se faire plaisir
et avoir des possibilités de tir », estime Philippe Senghor.
Un
état d'esprit
Une
philosophie qu'il s'est appropriée progressivement, et qu'il
restitue aussi auprès de l'équipe réserve du club qu'il entraîne
depuis trois saisons. Une équipe composée en partie de ses jeunes
coéquipiers complétant l'effectif de la N2. Résultat : à cinq
journées de la fin, il ne manque qu'une victoire à l'ESG B pour
valider la montée en régional 2, le tout avec la meilleure défense
de la poule. Le succès est au rendez-vous aussi sur le banc de
touche.
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Le joueur est un cadre du vestiaire gardonnais. © Yannick Monsec. |
Il
n'y a de toute façon pas de place pour l'échec dans l'esprit de
Philippe Senghor, qui est presque un entraîneur sur le terrain. «
Je vois le basket comme les échecs. Si on lit le jeu, que l'on sait
ce que va faire l'adversaire en attaque, en défense, ses stratégies,
on analyse mieux, on a moins besoin de se déplacer et on a plus de
chance de gagner », détaille-t-il. Gagner, ou plutôt ne pas
perdre, comme il aime à le répéter.
«
Un coach m'a posé une question un jour, et je l'ai toujours en tête.
Il a demandé aux joueurs s'ils aimaient gagner ou s'ils détestaient
perdre. Je déteste perdre. Aimer gagner, c'est accepter la défaite.
Quand on perd un match, je n'en dors pas de la nuit, je suis horrible
à vivre », avoue le gardonnais. Une mentalité qui colle à ce
projet de l'ESG, qu'il porte comme Antoine Adgnot, formé au club,
mais aussi Ridwan Rabah et Darko Kastratovic, arrivés en 2014.
«
On est devenu une famille, on se trouve les yeux fermés sur un
terrain, on a cette culture, une base solide qui s'est forgée lors
de la montée de N3 en N2 notamment. C'est à travers ces souvenirs
que l'on se construit » lance Philippe Senghor. Garant de la
continuité de cette mentalité, il n'est pas étonnant qu'il soit
devenu l'un des joueurs emblématiques du club. Derrière sa
discrétion apparente se trouvent un caractère affirmé, et des
idées bien tranchées.
«
Quand on est ensemble sur le terrain, on ne veut qu'une chose, que
Gardonne soit une place forte de la N2, un club respecté à ce
niveau. La seule chose qui compte, c'est que le club reste, nous, on
partira tous à un moment », conclut-il. Un message fort pour celui
qui, à 34 ans, ne se voit pas évoluer ailleurs qu'à l'ESG l'an
prochain, et qui se tient à la disposition des dirigeants pour
prolonger encore l'aventure.
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